Déjà client ? 
Connectez-vous

Quel est l’impact du pilotage de la ventilation sur ses performances ?

Publié le 18/11/2024

Sur sa plateforme pilote de Boigneville (91), ARVALIS compare depuis plusieurs années des itinéraires de stockage appliqués à des lots de blés tendres récoltés sur la ferme de la station expérimentale d’ARVALIS. L’objectif est de comprendre l’impact sur la qualité des grains, le niveau des infestations et les performances de refroidissement de ces différents itinéraires.

Quelle méthodologie avons-nous appliquée ?

Parmi les critères de comparaison, figure le mode de pilotage de la ventilation. Trois modes de pilotage sont observés :

  1. Un pilotage dit « horaire » qui consiste à ne mettre en route la ventilation que si les températures prévues restent inférieures à une température « seuil » sur toute la plage 22h00-6h00. La décision est prise tous les jours à 17h00 en se basant sur les prévisions horaires du site « MétéoCiel » (modèle Arôme, prévisions par heure). Chaque plage de ventilation dure 8h00.
  2. Un pilotage automatique à l’aide d’un thermostat (Sec-LIS©) qui consiste à programmer un seuil de déclenchement automatique de la ventilation. Les plages de ventilation débutent dès que la température extérieure est inférieure au seuil fixé et s’arrête dès qu’elle redevient supérieure au seuil. Leur durée est variable.

    Ces deux premiers modes de pilotage sont conduits en paliers successifs. Le premier palier vise à atteindre 20°C dans le grain, le second à atteindre 12°C. Le réchauffage du grain est pris en compte pour définir les seuils de déclenchement. Dans le cas présent, il a été mesuré à 1°C. Les seuils de déclenchement considérés sont donc de 19°C et 11°C.
  3. Un pilotage automatique qui tient compte à la fois de la température de l’air extérieur et de la température du gain, se basant sur la différence de température entre le point le plus chaud du grain stocké et la température extérieure (mode dit « automatique » du système Javelot).

Ce troisième mode de pilotage n’est pas conduit par paliers mais en continu. La consigne de déclenchement du ventilateur évolue en permanence en fonction de la température extérieure et de la température du grain. Les consignes par défaut ont été utilisées lors de la première année de test, à savoir une ventilation avec de l’air ayant une température inférieure de 7° à 10°C au point le plus chaud du grain. La deuxième année, la consigne a été modifiée pour élargir les possibilités de ventilation à de l’air compris entre 8° et 20°C en dessous de la température du point le plus chaud du grain. Chaque plage de ventilation dure au minimum 1h en première année et 3h en deuxième année.

Les trois cellules, conduites avec des stratégies de ventilation différentes, sont toutes remplies de 40 à 45 tonnes de blé tendre, et ventilées avec des ventilateurs identiques. Pour le suivi des températures, les cellules sont équipées de ligne de thermométrie qui relèvent la température du grain sur toute la hauteur, avec des capteurs espacés de 80 cm. Pour la comparaison entre les trois modes de pilotage, on considèrera le refroidissement d’une cellule comme achevé lorsque l’ensemble des relevés de température à un même moment sont inférieurs ou égaux à 12°C, température en-deçà de laquelle les insectes ne se reproduisent plus. Pour mesurer la sensibilité des performances des différents mode de pilotage à cet objectif, le calcul du nombre d’heures nécessaires pour que tous les points soient inférieurs à 12,5°C a également été effectué. 

Quelle incidence sur les performances de la ventilation ?

Deux indicateurs peuvent être utilisés pour apprécier la performance d’une ventilation : le nombre d’heures nécessaires pour obtenir la température souhaitée, et la date d’achèvement du refroidissement. 

Les Tableaux 1 et 2 présentent le nombre d’heures de ventilation qu’il a fallu effectuer pour atteindre 12°C ou 12,5°C avec chacun des trois modes de pilotage considérés. On remarque en première intention qu’il existe un effet lié à la campagne très important, quel que soit le mode de pilotage, tant sur le nombre d’heures que sur la date de réalisation. Autre observation : le fait de vouloir à tout prix descendre l’ensemble du grain à 12°C plutôt que 12,5°C, y compris sur la pointe du tas, peut engendrer un nombre d’heures supplémentaires considérables. Ceci est particulièrement vrai en 22/23 pour le mode 2. 

Cependant, quels que soient la campagne et l’objectif, le nombre d’heures nécessaires le plus faible est obtenu avec le pilotage automatique par différence (mode 3), et le plus élevé avec le pilotage automatique par seuil (mode 2). L’écart entre les deux pilotages est important : entre +60% et +90% d’heures en plus pour le mode 2. A l’inverse, le pilotage par seuil permet dans toutes les situations observées d’achever au plus tôt le refroidissement des grains. La différence, lorsqu’il y en a une, n’est toutefois que de 7 jours.

Comment expliquer la différence entre les trois modes de pilotage ?

Avec deux années d’essais, nous ne pouvons que rendre compte d’observations qui mériteront d’être confirmées avec plus de recul. 

Si l’on compare les modes 1 et 2, tous deux conduits en deux paliers avec des seuils identiques, on constate que la règle de décision que nous nous sommes imposés pour le mode 1 (la totalité des heures entre 22h00 et 6h00 avec des températures prévues en dessous du seuil) conduit à réaliser la ventilation plus tardivement, ce qui se voit particulièrement en 2023/2024 avec une date de réalisation décalée de plus d’un mois par rapport au mode automatique par seuil. Il en résulte que la température moyenne de l’air insufflée est systématiquement inférieure avec ce mode horaire, et ce malgré un petit nombre d’heures de ventilation avec une température d’air supérieure au seuil, en général en début de plage de ventilation, liée à un défaut des prévisions.

Concernant les deux modes automatiques par pilotage, l’observation de l’impact des consignes sur la qualité de l’air entrant montre une grande différence entre ces deux modes, particulièrement en début de stockage lorsque le grain est encore chaud. Ceci est visible en Figure 1. Les plages possibles de ventilation sont toutes celles pour lesquelles la température de l’air extérieur est inférieure au seuil de déclenchement fixe pour le mode 1 (le seuil est figuré en noir) ou toutes celles qui sont comprises entre les deux seuils, mobiles, de déclenchement (en orange) et d’arrêt (en jaune) pour le mode 3. En début de stockage, c’est-à-dire pendant la réalisation du palier 1 du mode 2, les plages de ventilation possibles pour ce mode sont bien plus nombreuses que pour le mode 3, le ventilateur se déclenche fréquemment, mais avec des températures d’air extérieur souvent plus élevées comme on peut le voir en Figure 2.

Ce qu’il semble donc se dessiner, sur la base de ces deux années d’observation, c’est que le pilotage le plus efficient pour refroidir le grain est de déclencher la ventilation lorsque la température de l’air est inférieure de 7°C au point le plus chaud du grain (en n’oubliant pas de tenir compte du réchauffage de l’air lié au ventilateur). En procédant de la sorte, on insuffle en moyenne un air plus froid que lorsque l’on pilote la ventilation avec un seuil unique par palier. Ceci peut entraîner un refroidissement légèrement différé.

NB : L’abaissement du seuil bas d’arrêt de la ventilation sur le mode 3 entre 22/23 et 23/24 a permis de ne pas perdre des heures de ventilation propices au refroidissement avec des températures plus fraîches. Aucun impact sur une éventuelle réhumidification du grain n’a été constatée sur les deux années d’observation.

Article rédigé par Katell Crépon et Amélie Tanguy, Pôle Stockage et Conservation des Grains, ARVALIS (Boigneville).

calendar-full linkedin facebook pinterest youtube rss twitter instagram facebook-blank rss-blank linkedin-blank pinterest youtube twitter instagram